Quand j’ai découvert le Tarot, j’ai aussi découvert combien il avait inspiré des artistes. Cela n’a fait que renforcer mon intérêt, ma fascination, mon attachement pour ce grand livre d’images. Visiter le Jardin des Tarots de Niki de Saint Phalle est un rêve de tarologue que j’ai enfin réalisé.
Au bout du chemin, dans un paysage typique du sud de la Toscane, il y a un haut et long mur avec une grille d’entrée arrondie pour garder jalousement les secrets du Jardin. C’est un véritable passage « entre le monde extérieur et le monde du rêve » (1). Je suis un peu fébrile parce que je n’aperçois toujours rien, il faut grimper encore un peu pour rencontrer Le Magicien et L’Impératrice.
Ces sculptures gigantesques me font rapetisser comme Alice au pays des merveilles. De loin elles étincellent, de près la mosaïque de miroirs et de céramiques révèle une incroyable profusion de détails, de messages, de clins d’œil… Un monde symbolique qui vous happe. D’autant plus qu’on entre dans ces cartes personnages : L’Impératrice est une maison avec cuisine, chambre et salle de bains, où Niki de Saint Phalle a vécu pendant les travaux. L’Empereur est un château dont on traverse les douves avant de parcourir les coursives.

Le Tarot est un jeu et ce Jardin une partie de cache-cache : j’ai trouvé Le Pendu à l’intérieur d’un curieux arbre à serpents mais je ne sais toujours pas où est Le Fou… Je me suis assise à l’ombre près de L’Ermite, j’ai rencontré L’Etoile, j’ai vu Le Monde tourner sur une des machines de Jean Tinguely. Je me promène parmi les vingt-deux Arcanes majeurs et ce n’est plus une métaphore ! C’est un paysage dont je fais partie, dans lequel je chemine au hasard, comme on tire les cartes.

Cette visite est une extraordinaire mise en abyme : grâce à Niki de Saint Phalle, le Tarot prend vie, il nous habite comme nous pouvons l’habiter. Le parcours initiatique et transformateur des Majeurs, que je transmets dans mes Ateliers, est ici un sentier bien réel. C’est une expérience que je ne suis pas prête d’oublier et qui me conforte, s’il en était besoin, dans ma volonté de transmettre le Tarot.
(1) dixit Niki de Saint Phalle dans Le Jardin des Tarots, Editions Benteli, 1997.
Le Jardin des Tarots se trouve à Capalbio en Italie : ilgiardinodeitarocchi.it
Niki de Saint Phalle (1930-2002) a consacré presque vingt ans à la création du Jardin des Tarots, aidée par de nombreux artisans et artistes, dont son compagnon Jean Tinguely (1925-1991).